Pour son premier roman, Chloé Ronsin Le Mat nous livre une copie nette, franche et sans bavure ! Anna partout est une belle réussite littéraire que l’on peut souhaiter à tous ceux qui s’engagent sur le chemin de l’écriture toujours pavé d’écueils. Outre ces obstacles franchis avec brio, Chloé Ronsin Le Mat révèle une vraie maîtrise de son sujet. Et le moins que l’on puisse écrire, c’est qu’elle ne s’est pas engagée sur la voie de la facilité.

Bourré de détails et d’atmosphères, ce roman laisse peu de place à notre imaginaire, mais soulève beaucoup de questions. Au fil de la lecture, nous savons très bien que Chloé Ronsin Le Mat nous fera atterrir quelque part... mais où ? Et c’est bien ce fil conducteur qui nous permet de suivre la vie d’un narrateur un peu spécial. Il semble peu sociable, ne s’intéresse qu’à peu de choses et encore moins à ses contemporains. Chez lui, le courrier s’amoncelle dans sa boîte aux lettres et sous son paillasson. Son travail comme téléconseiller pour proposer la fibre aux abonnés téléphoniques ne l’enthousiasme pas plus que çà.

Du côté des femmes, l’intérêt est mitigé. Il a fréquenté une Anglaise lors d’un Erasmus avant de partir. Entre deux eaux, ce trentenaire est habité par une passion. Celle qu’il éprouve pour sa demi-sœur Anna. Faisant une véritable fixette sur cette mystérieuse Anna, il cherche à renouer des liens avec elle. Dans son chaos intérieur, il n’y a plus rien qui n’a autant d’importance qu’Anna. Le matin, il se rend à son domicile pour l’apercevoir avant de prendre son travail. Même scénario le soir. De la rue, il suit le balai des lumières qui s’allument et s’éteignent dans l’appartement laissant entrevoir la silhouette d’Anna. Il parviendra même à aller plus loin en installant un logiciel permettant de la surveiller via sa webcam.

Chloé Ronsin Le Mat nous gratifie de belles images littéraires pour nous parler de l’intimité d’Anna. Malgré sa relation avec une jeune influenceuse, le narrateur ne peut décrocher de son obsession pour Anna. Il ira jusqu’à créer un faux compte Instagram pour y poster des photos de sa demi-sœur. Prenant de plus en plus de risques, il finira par faire le pas de trop. Celui qui mettra à jour son espionnage via la webcam d’Anna.

Les dernières pages de ce roman, où l’on navigue entre la réalité, l’imagination, la violence et le monde virtuel des réseaux sociaux, offrent une véritable symphonie littéraire.

Pascal Hébert

Anna partout, de Chloé Ronsin Le Mat, éditions Scribes, 256pages, 21euros.

Photographie Francesca Mantovani.