C’est un artiste à part ce François Morel. Une espèce de Tati version chroniqueur. Sa plume nous évade chaque vendredi matin sur France Inter lorsqu’il démarre sa chronique. Depuis douze bonnes années, le Flérien commente avec un regard tout à lui l’actualité chaude ou non.

Le plus souvent, il met sous nos yeux l’absurde des événements. Il peut être aussi bien grave que joyeux mais très souvent espiègle. C’est François Morel : un artiste biberonné à la chaleur de Georges Moustaki et à la drôlerie de Raymond Devos. Ce mélange de poésie et d’absurde va bien à ce poète qui publie 3 minutes 25 de bonheur, ses chroniques de 2021 à 2023.

Chaque vendredi à 8 h 55 dans le studio tenu d’une main de maître par Nicolas Demorand, François Morel apporte un peu de fraîcheur dans l’actualité du matin. Une bulle d’oxygène dans le tintouin des mauvaises nouvelles et des polémiques sans fin.

Dans cette parenthèse enchantée, il peut être à la recherche des convictions politiques du Père Noël ou dénoncer le suicide d’une jeune fille de 14 ans sans doute victime de harcèlement. En reprenant intelligemment la chanson de Graeme Allwright "Qui a tué Davy Moore ?", François Morel interroge sur les responsabilités de la société, des politiques et des coupables de harcèlement.

C’est ça aussi François Morel. Un homme qui se révolte avec les armes de la langue et de la poésie pour frapper encore plus fort. Son papier sur l’anniversaire de Brassens est également un bijou. Il dénonce ceux qui font parler les morts à tort et à travers  et "S’il y a bien un mort qu’on en peut pas vraiment faire parler, c’est Georges Brassens. Sauf dans ses chansons où il a dit tout ce qu’il avait à nous dire." Ce n’est pas Maxime Le Forestier qui dira le contraire, lui qui sert si bien le bon maître. Un bon maître loin de la télé poubelle que représente le citoyen Cyril Hanouna sur C8 avec son TPMP... également bien épinglé dans une chronique intitulé Garde des sots. En 1991, Jean Ferrat avait vu juste : "Ce soir, ce soir, après La Roue De La Fortune/Un PAF obscène, un PAF obscène est à la une."

Avec François Morel, il y a de l’humour, de la malice mais pas que...

Pascal Hébert

3 minutes 25 de bonheur (chroniques), de François Morel, éditions Denoël, 256 pages, 19 euros.